L'interview de Joël Dicker

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  • Mise en ligne : 12 décembre 2019
  • Mise à jour : 12 décembre 2019

Joël Dicker est né à Genève le 16 juin 1985, il est écrivain. Son 2ème roman, « La Vérité sur l’Affaire Harry Quebert » a été adapté en série télévisée. Produite par MGM et réalisée par Jean-Jacques Annaud, avec Patrick Dempsey dans le rôle de Harry Quebert.

" Je considère le succès comme quelque chose qui est au jour le jour et dont je me réjouis."

Seniors.Mag. : Joël, à 34 ans vous êtes déjà reconnu en tant que grand écrivain. Vous avez reçu de nombreux prix et votre deuxième roman « La Vérité sur l’Affaire Harry Quebert » a connu un succès phénoménal avec l’adaptation en série télévisée. La barre est déjà tellement haute avec vos 4 romans que l’on vous attend au virage. Est-ce que vous n’avez plus droit à l’erreur ?

Joël.Dicker. : Je ne le vois pas comme cela parce qu’avant de connaître le succès, j’ai pendant 7 longues années, ce qui m’a paru très long, écrit 5 romans qui ont été refusés par tous les éditeurs. Finalement, j’ai écrit « Les derniers jours de nos pères » qui est paru sans avoir vraiment de succès. C’est avec « La Vérité sur l’Affaire Harry Quebert » que le succès a commencé. Je considère donc le succès comme quelque chose qui est au jour le jour et dont je me réjouis. Je suis conscient que ce succès est très fragile et je ne sais pas si j’aurai la chance qu’il dure dans le temps. Je ne suis pas dans l’inquiétude car je suis surtout attaché à cette idée de me dire qu’il faut que j’aie du plaisir dans ce que je fais.

S.M. : Comment expliquez-vous votre succès ? Est-ce que c’est le talent ? Est-ce que c’est le travail ?

J.D. : Je ne sais plus qui disait : c’est 2 % de talent et 98 % de travail mais c’est à peu près cela. Qu’est-ce que le talent ? ce n’est pas très clair mais… est-ce que c’est quelque chose qui fait que vous êtes doué pour écrire ou… est-ce ce qui fait que vous avez en vous cette abnégation pour produire les 98 % de travail ? Le talent est difficile à définir.

S.M. : Est-ce que le milieu familial peut aussi aider à s’épanouir ? Votre mère libraire et votre père professeur de français, ont-ils été propices à votre destinée professionnelle ?

J.D. : C’est vrai qu’il y a toujours eu beaucoup de livres chez moi et j’ai toujours été très attaché à la lecture et à la littérature … Il y a forcément quelque chose qui reste de cette découverte dont j’ai pu profiter. Il y avait une curiosité du livre. On pouvait ouvrir un livre, le fermer, ne pas l’aimer …. Il y avait surtout une désacralisation : c’était un objet qu’on pouvait essayer.

S.M. : Vous avez dit chez un confrère : « J’essaie de véhiculer une autre image, on peut écrire tout en étant à la mode et dans le vent. Le principal est de donner envie de lire ». Votre souhait est-il de populariser la littérature, de la démocratiser ou au contraire de la mettre sur un piédestal, lui donner de la hauteur pour qu’elle soit un petit peu à la mode justement ?

J.D. : C’est tout cela en même temps parce qu’il faut arrêter de faire croire aux gens que la littérature n’est pas faite pour tout le monde. Les gens ont envie de lire, il faut rappeler que la littérature est à la base des séries télé et de tous les divertissements d’aujourd’hui et qu’elle est d’ailleurs le numéro un des divertissements depuis toujours.

S.M. : Comment se passe la journée d’un écrivain ? Est-ce que l’on arrive à avoir chaque jour la même inspiration et surtout une inspiration sur demande ?

" Pour moi la difficulté d’un écrivain est justement de ne pas écrire et de faire autre chose. "

J.D. : Chaque écrivain a sa propre méthode. Pour moi la difficulté d’un écrivain n’est pas de se mettre dans son bureau et d’écrire. La difficulté est justement de ne pas écrire et de faire autre chose. J’ai de l’inspiration tout le temps et il y a toujours une idée, un projet… Donc je ne me presse pas à l’écriture. Je ne me dis pas aujourd’hui « il faut que j’écrive ». Mais je me précipite le matin en me disant génial, qu’est-ce qui va se passer aujourd’hui dans le prochain roman ?

S.M. : En fait vous découvrez au fur et à mesure ce que vous allez écrire…

J.D. : Oui, je ne sais pas exactement ce qui se passe, donc je découvre au fur et à mesure.

S.M.  : Je pensais que l’écrivain avait construit l’histoire dans sa tête et connaissait le déroulement avant que cela passe par l’écriture…

J.D. : Il y en a oui qui fonctionnent comme cela mais ce n’est pas mon cas.

S.M. : En tant qu’écrivain, comment avez-vous vécu l’adaptation à l’écran de votre roman « La Vérité sur l’Affaire Harry Quebert  »  ? : Est-ce que vous n’avez pas eu peur que l’histoire vous échappe, ou que la création ne nous plaise pas 

" Ça a été un plaisir de découvrir comment se passe un tournage. "

J.D. : J’ai vu Jean Jacques Annaud à plusieurs reprises et nous avions beaucoup parlé. J’étais très enthousiaste et pas du tout inquiet quand il m’a expliqué ce qu’il voulait faire. J‘ai vécu ce projet de façon décontractée et très heureuse. Je ne l’aurais pas fait si j’avais été inquiet, ou que ce soit complètement à l’envers de l’histoire que j’avais écrite. Le résultat est très fidèle au roman. J’ai été sur les plateaux pendant les tournages et j’ai beaucoup participé mais pas de façon décisionnaire car je n’allais quand même pas lui apprendre comment faire un film. Ça a été un plaisir de découvrir comment se passe un tournage.

S.M. : Qu’est-ce qui vous plaît dans le métier de l’écriture justement ? C’est un métier où on peut se sentir seul. Vous avez une âme de solitaire ?

J.D. : Ah non moi justement c’est parce qu’avec l’écriture je ne suis jamais seul, je suis entouré de tous les personnages, de l’histoire. J’aime écrire parce que j’aime lire et que j’aime me laisser prendre dans un roman, dans une histoire qui va m’amener dans une autre réalité. Et là je ne suis plus à ma table de travail en train d’écrire une histoire mais je vis l’histoire et c’est ça qui me plaît beaucoup.

S.M. : Quels sont vos projets pour les mois à venir ? Vous avez suivi les cours Florent il y a quelques années ? Vous souhaitiez devenir acteur ?

J.D. : Au cours Florent j’ai réalisé que je n’avais pas du tout les compétences et les qualités pour faire un bon acteur. Je me consacre donc à l’écriture où je suis bien meilleur.

Propos recueillis par Pascale Peiffer

SES ROMANS :

2010 : Les Derniers Jours de nos pères Éditions de Fallois

2012 : La Vérité sur l’affaire Harry Quebert Éditions de Fallois

2015 : Le Livre des Baltimore Éditions de Fallois

2018 : La Disparition de Stephanie Mailer Éditions de Fallois

 

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