Michel Fugain : le poète devenu philosophe !

  • Par Pascale PEIFFER
  • Mise en ligne : 27 février 2018
  • Mise à jour : 27 février 2018

Michel Fugain en quelques mots :
Né le 12 mai 1942 à Grenoble, il enregistre un premier album en 1967 (Je n’aurai pas le temps). En 1972, c’est la naissance du Big Bazar. Il a 4 enfants : Sophie née d’un amour de jeunesse, Marie (1973), Laurette (1979-2002) et Alexis (1993).

Seniors Mag (S.M.) : Vous serez à Bordeaux dans quelques jours pour présenter un spectacle plus « power » et plus « fusion ». Qu’est ce que le public va découvrir dans ce nouveau show ?

Michel Fugain (M.F). : On a tourné pendant 4 ans à 12 musiciens sur scène. Il y avait des cuivres, des percussions et c’était une écriture particulière d’un garçon qui est formidable et qui s’appelle Pierre Bertrand. Aujourd’hui on présente une formule où on est 8 et en étant « plus fusion, plus power », on va dans le sens de ce que je recherche avec Pluribus car je suis maintenant « Pluribus » avant d’être « Fugain ».  Pluribus est un ensemble qui se retrouve à la croisée de toutes les musiques avec de très bons musiciens et notre plaisir est de réarranger des musiques. On est bien obligés de reprendre certaines chansons comme « la fête », « fais comme l’oiseau »… mais ce ne sont pas celles qui ont le plus de suffrages. En fait, quand les gens applaudissent des tubes, ils s’applaudissent et applaudissent leurs souvenirs. Donc Il ne me viendrait pas à l’esprit de les priver de cela. Mais les autres chansons les étonnent et les interpellent plus. On fait « la Bête immonde », c’est une chanson que le public ne connait pas et pourtant elle est de 1995. Ce spectacle n’est pas un récital et heureusement car je n’aime pas cette formule.

S.M. : Vous avez besoin d’une bande de copains, d’être entouré de musiciens, d’avoir une troupe avec vous sur scène ?

M.F. : On a besoin de « déconner » sur scène. Cependant tous les enchainements qui sont dans le spectacle, s’ils sont rigolos, sont travaillés et donnent un sens à chaque chanson et à tout le show. On parle du déroulement de la vie, des rapports que l’on a les uns avec les autres et tout cela donne  autant d’occasion de « déconner » ensemble par ce que l’on est plusieurs générations sur la scène. Je suis bien évidemment le plus âgé ce qui permet de souligner un peu la transmission.  En fait on ne refait pas le monde mais on soulève des choses essentielles et on s’accompagne les uns, les autres … Je pense que l’humain est une denrée périssable et que l’on s’achemine tous vers la date de péremption.

S.M. : Vous aimez ce rôle de chef de bande sur scène ?

M.F. : Je pourrais ne pas monter sur une scène, ce qui me serait extrêmement douloureux mais tant qu’à faire autant que je le fasse avec plaisir. Or le vrai plaisir n’est pas de se regarder le nombril. Ce n’est pas d’arriver tout seul en disant « vous avez vu comme je suis beau et comme je fais de belles choses ». Le plaisir est de brasser de la vie et d’être contagieux. Je veux faire en sorte que le public  ait l’impression que l’on a passé la soirée ensemble. On ne partage pas seulement des chansons. On partage des mots, des regards, avec spontanéité. Je suis un être humain qui a une envie d’aller vers d’autres humains et que l’on se rencontre.

S.M. : A un moment donné c’est vous qui êtes parti dans votre maison de l’Ile Rousse et on dit même que vous viviez en ermite.

M.F. : Ça fait maintenant 15 ans que j’habite l’Ile Rousse pour des raisons personnelles. J’ai quitté Paris et une vie, puisque j’ai changé de femme encore que cela ne s’est pas fait tout de suite. J’ai eu de la chance de tomber sur une femme qui est exactement mon complément et je suis heureux chaque jour.

S.M. : Votre femme est musicienne ?

M.F. : Elle est musicienne, intelligente et on partage énormément de chose. On parle, on débat tous les deux mais on ne vit pas comme des solitaires. Ma maison est pleine l’été et à chaque vacances avec avec les parisiens. On a les enfants qui viennent également. Tout ça est tout, sauf un retrait. A Paris je n’arrive absolument pas à créer et quand je rentre le soir d’une journée de travail à Paris, je n’ai qu’une envie, c’est de me mettre dans mon fauteuil et rester comme un c.. devant ma télévision. Quand je suis ici (en Corse NDLR) ce n’est pas le cas, parce que les journées ont 24 heures. C’est une autre façon de vivre, un autre monde. On a un pied à terre à Paris mais je ne peux plus y vivre. Dès que l’on a terminé de travailler à Paris, on rentre ici.

S.M. : Est-ce que l’on aura l’occasion de voir Sanda (sa compagne NDLR) sur scène avec vous ?

M.F. : Elle chante avec moi dans le spectacle et elle chante très bien donc on na va pas se priver ! Pour en revenir au spectacle, les gens ne s’attendent pas à ce qu’ils vont voir par ce que ce n’est pas la norme. Est-ce que c’est de l’avant-gardisme ? Je ne sais pas.  Je pense que c’est la préservation de notre humanité. Il faut lutter contre une forme de mondialisation de la mentalité. Je fais par ailleurs un autre « spectacle-rencontre » :  LA CAUSERIE MUSICALE dans laquelle je vais rencontrer des gens qui aiment la chanson et où on se pose des questions comme « Est-ce que la chanson populaire est en danger de mort ? » ça c’est ce que je crois et les gens vont me répondre. ON se demandera aussi « Qu’est-ce que c’est que la chanson populaire ? » Donnons-lui une définition avec une phrase de Claude Lemesle « Un grand poème est l’âme d’un homme, une grande chanson est l’âme d’un peuple »  Donc si la chanson populaire disparait - chanson qui est l’âme d’un peuple -  où est l’âme de ce peuple ? Qui a intérêt à ce que l’âme d’un peuple disparaisse ? Et que toutes les âmes des peuples disparaissent afin de leur vendre à tous la même chose ? C’est ce que l’on appelle le marché ! la mondialisation que l’on nous vante tous les jours est une infâmie. C’est au détriment de l’âme des peuples.

S.M. : Qu’est-ce qui vous donne encore l’envie d’avancer et de bouger à 75 ans ?

M.F. : D’abord je ne fais pas un métier où l’on prend une retraite … Il se trouve que le vecteur principal de mon activité est la création avec un tout petit « c » car je ne me regarde pas le nombril. Pour moi c’est les chansons et la musique. Pour d’autres ce sera le cinéma, l’écriture. Cela nous permet d’en savoir plus sur nous-mêmes, parce que l’on parle de nous dans nos créations. Et donc on grandit, on apprend à garder l’espoir quand il y a des déceptions. Et Dieu sait si à 75 ans on a quelques déceptions politiques, philosophiques, parce que la nature humaine est moins jolie que ce que l’on voudrait mais il faut cependant continuer à garder l’espoir parce que l’on a des relais à passer à des générations futures.

S.M. : Est-ce que l’on peut dire que vous êtes heureux aujourd’hui ?

M.F. : Oui mais je me méfie du bonheur comme de la peste, le bonheur c’est quand le malheur s’arrête ! le bonheur c’est quoi ? Il faut que ce soit passager, fugace, ça en aura que plus de valeur. Le bonheur continuel ça s’appelle un « encéphalogramme plat ». En ce qui me concerne, les conditions sont réunies depuis quelques années. Ne serait-ce que par la présence de Sanda à mes côtés, ce qui est énormissime.

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