Interview de Christelle Chollet

  • Par Arnaud Onnainty
  • Mise en ligne : 18 mars 2025
  • Mise à jour : 18 mars 2025

Aujourd'hui Seniors mag a eu le plaisir d'échanger avec notre chère humoriste Christelle Chollet. L'Empiafée, Reconditionnée, elle nous dévoile tout sur ses derniers shows !

INTERVIEW : 

 

SM : Nous sommes heureux de vous retrouver aujourd'hui, pour une actualité toujours très riche ! Vous avez deux shows la même année et parfois même dans la même ville, comme c'est le cas à Bordeaux. Est-ce un choix de votre part ? Avez-vous perdu un pari ? 

 

CC : 

Exactement j'ai perdu un pari. Le pari de me reposer, de partir en vacances ! En fait la vie vous offre des trucs. On a fait une petite reprise de L'emPIAFé eà Paris, parce que c'était les 60 ans de l'anniversaire de la mort de Piaf et je trouvais que c’était bien de remettre un petit coup de projecteur sur cette Dame… Avant que Céline Dion le fasse, je précise. 

 

SM : Ce n'est pas vous qui l'avez demandé à Céline Dion ? 

 

CC :

Non, mais je l'ai coachée. Je ne pensais pas qu'elle allait faire du playback en fait, parce qu'au départ, moi j'avais travaillé avec elle en me disant, écoute, tu vas faire du live. Du coup, L'emPIAFée devait rester à Paris, au théâtre de la Tour Eiffel, c'était une petite parenthèse. On avait dit qu’on ne partirait pas en tournée. Finalement, une ville nous a demandé de passer, c’était en Suisse car nous étions passés chez eux il y a 15 ans avec L'emPIAFée. On a accepté et par la suite, une deuxième ville nous a appelé en nous demandant de passer chez eux puisqu’on faisait une date en Suisse, on a refusé. Mais ils ont insisté en nous rappelant qu’on faisait bien une date en Suisse et finalement, c’est comme cela que l’on arrive à 40 dates ! Cela m’a permis de faire une gymnastique intellectuelle assez importante. Un soir c'est «L’emPIAFée », à Bordeaux et le lendemain soir c'est « Reconditionnée », à Toulouse. Mais ça me va très bien ! Il y a très peu d’humoristes à faire cela : reprendre un spectacle qui a très bien marché, c'est déjà peu probable parce que l'humour est très vite obsolète. Et L'emPIAFée, c'est un ovni dans ce paysage-là. Je suis passée de la torture intellectuelle, à un apprentissage pour jongler entre ces deux spectacles, au plaisir total parce qu'on passe d'une ambiance à une autre même si cela est un peu schizophrénique. Ce spectacle c’est moi il m'a vraiment fait découvrir, qui a duré six ans, qui a fait plus d'un million de spectateurs, c'est un truc de fou. Je suis très heureuse mais je ne sais pas comment je vais faire quand je ne vais avoir qu'un spectacle après. Par ailleurs le nouveau spectacle arrive fin 2025, pour mes 20 ans de carrière. Parce que la boucle est bouclée, je me dis que la vie fait bien les choses. On a repris L'emPIAFée, cela devait s'arrêter au théâtre de la Tour Eiffel l'année dernière. Et là, on arrive à la fin de celui qui s’appelle Reconditionnée. Donc, les deux tournées de ces spectacles vont s'arrêter à peu près en même temps. Et surtout, je suis vraiment légitime à être dans Senior Mag avec mes 20 ans de carrière.

 

SM : Nous allons nous revoir l’année prochaine pour vos 20 ans ?

 

CC :

Oui nous nous reverrons l'année prochaine pour fêter mes 20 ans et il y aura un gros gâteau. Donc, on génère des choses, on n'est pas maître de ce qu'on fait, et puis ça vous emmène sur des chemins très très plaisants, très intéressants. J'ai par conséquent un bonheur insensé à faire ces deux spectacles, à me replonger dans L'emPIAFée, avec ce personnage que j'ai joué il y a 20 ans, c'est réellement plaisant. Je suis très gâtée. 

 

SM : L'emPIAFée, c'est un spectacle qui est un peu à part, celui qui vous a lancé. Mais, malgré tout, vous dites de ce spectacle pour vous, c'est un devoir de mémoire culturelle. Au-delà de ça, Piaf, c'est un peu votre idole ?  

 

CC :

Oui et non. C'est mon idole féminine et féministe. Je suis assez fan des femmes qui ont cassé les codes dans ces années-là et ont donné de la force et surtout du courage pour toutes celles qui viennent et qui viendront.

 

SM : Parce qu'elle était très moderne finalement. 

 

CC :

Oui, très moderne et surtout c’est un devoir de mémoire très important pour des choses historiques, dramatiques… Comme heureusement qu'il y a eu la commémoration de la libération des camps pour nos enfants qui sont jeunes, qui ne savent pas forcément. Heureusement qu'on parle de gens qui ont fait des choses fabuleuses, comme Simone Veil. C'est une question de culture, de survie on se doit d’en parler et de parler de toutes ces personnes à nos enfants. Tout s'oublie très vite. J'ai joué dans mon début de carrière avec un monsieur qui s'appelait Jean Marais, qui est une idole pour certains, que tout le monde connaît. Quand j'ai joué avec lui, j'avais 20 ans et il en avait 84, c'était juste avant qu'il nous quitte. Il me disait, « tu verras, tes enfants ne me connaîtront pas. » Ça me paraissait tellement inouïe, je lui disais « mais non Jean arrête, tu es vraiment une idole… » « Tu verras ! (Me répondait-il) Les auteurs ne disparaissent pas enfin en tout cas pas les plus importants. Ils sont toujours appris, contés, dits. Mais nous, les artistes de scène, nous sommes des étoiles filantes et dans 30 ans, plus personne ne parlera de moi. » Je me retrouve 30 ans après à me dire que si je ne parle pas de Jean à ma fille, si je ne lui montre pas les films, plus personne ne saura qui il était. Et si vous remontez, il y a des gens comme Loïe Fuller, qui ont été des stars internationales, ou comme Marie Dubas, qui a été une espèce de Piaf avant l'heure dont plus personne ne sait qui elles sont… Alors je fais pareil avec les gens de ma famille que j'ai aimés et que j'aime encore bien qu’ils soient décédés : par exemple, mes grands-parents, j'en parle tout le temps, il y a des photos d'eux à la maison. Les Egyptiens, partaient du principe qu’on ne mourrait que lorsqu'on ne parlait plus de vous. Tant qu’il y avait des stèles, des pyramides, des statues à l'effigie des pharaons, ils étaient encore là. D'ailleurs, les nouvelles dynasties qui voulaient faire disparaître les autres dynasties détruisaient tout ce qu'il y avait d'ostentatoire par rapport aux dynasties précédentes. Je suis assez en accord avec ça. Je trouve que c'est très important. Quand j'ai monté L'emPIAFée, il y a 20 ans on disait que Piaf était ringarde, c'était avant « la Môme » . Heureusement on en est revenu grâce à un film grâce et grâce à ma petite contribution personnelle. Allez, je me fais un petit melon du matin (rires). Mais grâce à tout ça, Piaf n'est pas tombé dans les oubliettes. Et heureusement, parce que ce qui fait aussi que les auteurs de ces chansons ne sont pas oubliés c’est ce qui nous construit, nous rend plus intelligents et peut-être plus forts.

 

SM : En fait, rediffuser des productions télévisuelles, des émissions, des films, où on reparle, de ces stars hors normes cela les rappellent à notre mémoire. C’est important pour que la nouvelle génération les connaisse et que la mémoire perdure ? 

 

CC :

C’était très important pour les 60 ans de l'anniversaire du décès de Piaf. C'est bizarre de dire ça, mais c'était important pour nous de refaire L'emPIAFée en le remettant au goût du jour, parce que 20 ans après, il y a des choses qui changent. 

 

SM : C'est une version 2.0 du spectacle ? Est-il actualisé, avec des nouveautés ?

 

CC :

Clairement, il y a des nouveautés, le spectacle est actualisé. J'ai rajouté un gospel dans le spectacle. Il y aura une version de l’Hymne à l’amour gospel, vous verrez c’est très sympa. La trame reste la même mais on a actualisé. Le pitch de départ c'était : « les chanteuses qui viennent dépanner ». Elle vient dépanner Miley Cyrus, parce qu'elle n'a plus de voix. Et tout d'un coup, elle s'aperçoit qu'on lui demande de chanter.

 

 

SM : Votre autre spectacle, c'est Reconditionnée. Il y a des nouveaux personnages. Est-ce qu'on peut dire que c'est un spectacle qui est plus personnel ? 

 

CC :

C'est surtout qu'il porte bien son nom parce que c'est le sixième spectacle et quand on crée un sixième spectacle, on est toujours un peu fébrile parce que je me demandais ce que j’allais faire de plus pour surprendre, pour rester moi-même, avec mes musiciens, mes sketches etc… Le souci c'est de rester Chollet ou de rester son essence tout en offrant quelque chose de différent. Et du coup, on s'était dit que j’allais faire des personnages que je n'avais pratiquement pas encore fait dans mes spectacles. Parce que mes autres spectacles, c'était plus des histoires que je narrais sur scène. Il y a un personnage qui racontait une histoire avec des chansons.

 

SM : Il y a eu une rupture, une évolution, entre votre cinquième spectacle et Reconditionnée ?

 

CC :

Ils sont tous différents. Evidemment comme son nom l'indique L'emPIAFée, c'est Piaf, on a eu l’Entubée,qui était la suite de L'emPIAFée. Le SOS chanteuse s'est transformée en industrielle du dépannage de la chanson, donc elle s'est faite cloner. Elle a donc un clone rock, un clone rap… Après on a cassé complètement les codes en se disant, bon ça y est, SOS Chanteuse c'est fini on va aller sur un autre truc donc j'ai voulu faire un spectacle ( Comic Hall,)très music-hall,: il y avait du costume, de la plume, vraiment je suis partie entre Broadway et les Folies Bergères. Il y a eu un best-of, il y a eu Numéro 5, que j’ai voulu comme un spectacle à la Beyoncé, c'est-à-dire avec des décors. Il y avait un énorme ghetto blaster, j'arrivais sur un pont-levis etc… C'était une déferlante visuelle. Et après, il y a eu le Covid qui est passé par là, et pour Reconditionnée, on s'est dit qu'on reviendrait à quelque chose avec un fond puissant et des choses à dire très puissantes. J'avais envie de parler de tout ce qui est agression sexuelle sur les femmes, de choses comme ça. Ce sont des sujets très compliqués pour la rigolade mais j'avais envie d'aller là-dedans. En tant qu'humoriste femme, je me devais de poser ma pierre à l'édifice. J'avais envie de parler des nouvelles technologies qui nous vont bien mais qui nous agacent. De l'écologie, avec la patate chaude qu'on se lance, on ne sait pas trop quoi faire… Je fais tout pour faire au quotidien tout ce que je peux pour la planète mais, j'ai l'impression que les écolos me tirent dans les pattes en fait. Je me dis mais pourquoi ils sont toujours en train de dégoûter les gens ? Les gens qui ne seront pas forcément adeptes de ça, qui n'ont pas compris qu'en fait, on était vraiment en danger pour des tas de raisons. La faune, la flore est en danger. J'ai dit, ça ne sert à rien. J'ai l'impression que tout ce que fait l'écologie ne sert à rien. Alors, évidemment, je parle des politiques parce que je suis des associations comme Bloom, qui font énormément... Paul Watson etc… Évidemment que ce sont ces gens-là qui devraient être à la tête des partis politiques écologiques. Ceux qui s'y connaissent, qui savent vraiment ce qui se passe, qui savent gérer, qui ne font pas du totalitarisme absolu tout le temps, à deux balles. J'avais envie de parler de tout ça. Et ce spectacle-là, c'est la réunion de tout ça. Mais j'ai essayé d'en parler sans donner de leçons et en faisant que des trucs drôles parce que c'est quand même la base de mon métier. Et du coup, l'écologie, ça s'est transformé en un taureau sur scène qui regarde les gens. Le sketch sur les violences faites aux femmes, ça s'est transformé par la prédatrice. On a inversé. D'ailleurs, c’est Rémi, mon mari, qui a eu l'idée d'inverser de mettre une femme prédatrice sexuelle, qui reprend les phrases qu'on a entendues dans l’actualité, que disent les hommes avec une décontraction absolue. Ce spectacle, c'est une réunion de tout, je parlais de fond, parce qu'on a fait des spectacles avec du fond évidemment et de la forme, mais dans le cas présent j’avais envie de repartir sur quelque chose de plus fort au niveau du fond, en parlant de sujets difficiles, et puis sous une forme plus minimaliste on va dire. J'ai toujours mes musiciens. La musique dans mes spectacles fait que ce n'est jamais complètement minimaliste.On part toujours sur un mélange de rire et de concert de rock donc voilà les gens se lèvent, chantent, dansent, rigolent. Et ma foi, le cocktail fonctionne encore bien.

 

SM : Le cocktail fonctionne très bien. Je vous ai vu, c'était l'année dernière pour Reconditionnée à Bordeaux. J'avais beaucoup aimé le début du spectacle où vous aviez provoqué tout le monde sur : de mémoire « Est-ce qu'on peut rire de tout ? Vous aviez énuméré les sujets. Je voyais le public au premier rang un peu embêté.

 

CC :

On se pose toujours cette question. Mais il faut surtout la poser aux autres au public pour connaitre leur ressenti. Et c'est rigolo ! Quand je demande si on peut faire un sketch sur les femmes battues, la réponse est non mais je le fais pour leur prouver que c’est possible. Est-ce que je peux faire un sketch sur les hommes battus ? Vous voyez, oui, je l'ai fait aussi. Finalement je parle de tout ! Partout le public dit parfois oui et non…Le sujet des religions ? Non, peut-être pas, en fait. Et moi, je leur dis, non, les religions, ça ne vaut pas le coup de mourir pour une vanne. Évidemment que je parle de ça. Mais en disant ça, c'est déjà un sketch sur ce sujet. Ce qui est formidable avec cette introduction, c'est qu'au fur et à mesure de l'actualité, évidemment, je rajoute des choses. Maintenant, je demande si on peut faire des vannes sur l’Abbé Pierre, sur les premiers ministres...

 

SM : Vous avez une autre actualité. Il y a deux, trois ans, vous avez racheté un théâtre. Et là, cette année, vous êtes productrice Des Années Twist, qui va passer d'ailleurs à Bordeaux.

 

CC :

Bordeaux, Toulouse, Lille et Troyes. Le spectacle s'appelle encore, pour l'histoire, « Les années Twist », c’est encore du devoir de mémoire. Moi, j'ai démarré dans la compagnie Roger Louret. Je suis restée six ans dans cette compagnie. Roger était mon ami. Il est décédé il y a deux ans. Et j'ai toujours ce truc où je n’ai pas envie qu'on oublie. Roger, c'était un grand homme de théâtre vraiment de music-hall et il a été vraiment un mec qui a rassemblé. Il y a eu Muriel Robin, Elie Semoun, Nicolas Marié, Eric Laugérias et Grégory Bacquet… Il y a eu des tonnes de gens qui sont passés et je ne vous parle même pas des musiciens, danseurs, chanteurs, qui sont passés par cette compagnie. Ce mec est très important dans le paysage culturel français, on n'en parle pas beaucoup, mais comme pas mal de metteurs en scène. Lui, il a été très important parce qu'il a réuni les artistes. Il a fait un mélange de chanteurs, de danseurs, de musiciens, de gens de théâtre pur. Il a été un des premiers à monter des pièces contemporaines de théâtre à Paris, en France. Évidemment que c'est un homme de théâtre. Il a monté Molière, Musset, Marivaux, il a monté Labiche. Il a permis à des gens, Nicolas Briançon, notamment, de monter ses pièces, c'est grâce à lui que j'ai joué avec Jean Marais, avec Bernadette Laffont, dans l'Arlésienne...  Il a réuni tellement de forces. On a fait un philharmonique à Bercy, tout le monde a oublié, on a joué La Vie Parisienne à Bercy avec un philarmonique. Ils avaient fait un décor où les 40 musiciens montaient dans le lustre… Quand il est parti on s'est tous sentis un peu orphelins. On s'est tous retrouvés Muriel Robin, Elie Semoun, à son enterrement Il y avait Cabrel, Il y avait tout le monde. C'était dans le Lot et Garonne, dans un petit village. Il a fait beaucoup de choses à Paris, mais il a fait vivre la province, il a fait vivre son village. Il a parlé pendant 7 ans, tous les jours, de Montclar, en Lot et Garonne, pour dire que la culture avait besoin de tas de choses, mais qu'on pouvait faire de la culture aussi en Province. On lui avait fait une fête dans le Lot l’année dernière parcequ’il était et reste important et Jean-Pierre Foucault est venu, Muriel Robin aussi. Tout cela pour dire que j’avais dit à mon mari qu’on allait faire une soirée spéciale Roger au théâtre que nous avons acheté il y a 8 ans. On produit pas mal de choses. On a produit mes spectacles, évidemment. On a produit des pièces, on a produit des spectacles pour enfants… Et puis, il me dit « Mais Roger, il n'y en a rien à faire que tu lui fasses un hommage, Roger, ce qui serait important pour lui, c'est ton histoire de Pharaons, tant qu'on parle de lui, ce serait qu'on monte un spectacle. ». Et mon mari qui dit ça, lui, il n'était pas dans la compagnie, il m'a dit « Mais pourquoi on ne montrait pas les années twist ? » Il n'avait pas vu les années twist il ne connaissait pas le bordel que c'était et je lui ai dit oui pourquoi pas. Nous sommes partis dans cette aventure qui dure depuis 2 ans et nous nous sommes rendu compte de l'universalité de ce spectacle. On l'a appelé, renommé, Les années 60 le musical, ce qui est plus juste, parce qu'on raconte l'histoire des années 60 en musique. C'est un spectacle avec des chanteurs, danseurs, comédiens, des musiciens. Il y a 200 chansons, 200 costumes : c'est un spectacle incroyable qui cartonne à Paris. Et il va partir en tournée, aussi grâce au réseau qu'on avait avec Roger. Parce qu'il n'a pas été oublié. Je pense notamment à Blandine Harmelin, qui travaille pour les Casinos Barrière, qui fait un boulot fabuleux de programmation depuis 30 ans. A la fin du spectacle il y a une projection qui dit : Spectacle de Roger Louret,  on est très fier de cela. Je me retrouve à être productrice d'un spectacle que j'ai joué il y a trente ans et dans lequel d'ailleurs il y a des potes d’il y a trente ans qui jouent les parents maintenant. Ils avaient 20 ans à l’époque comme moi notamment Olivier Bénard et Magali Bonfils qui sont des acteurs, chanteurs fabuleux. C'est une histoire hyper touchante, on est très fiers avec mon mari! Les jeunes ont entre 20, 25 ans, des petits bouts comme ça qui débutent et qui sont au top de leur art. Lou Nagy, Martin Heuzard… Tous les gamins qui sont dans ce show, mais vous n’imaginez pas leur niveau. Et moi, j'étais comme eux il y a 30 ans, mais j'avais beaucoup moins de niveau. Mais, c'est aussi pour vous dire que cette histoire de mémoire, c'est aussi légitime parce que c'est ce qui m'a formée. Roger, c'est lui qui a insufflé à mon petit cerveau, de 20 ans à l’époque, qu’il n'était pas obligatoire d'avoir des barrières quand on est un artiste, et que c'était mieux de ne pas en avoir. Que si on avait envie de chanter, de danser, de jouer la comédie, de faire du cinéma, de faire du théâtre, de lire, d'écrire et même de produire on pouvait le faire. Donc, très curieusement, j'ai réussi à faire deux philharmoniques avec mes spectacles dans ma vie. Un avec L'emPIAFée, l'autre avec Numéro 5, avec des orchestres philharmoniques de 40 personnes. Quand on a pris goût à quelque chose, on fait en sorte de refaire, de reproduire. En tout cas, de ne pas se cantonner à « non, ce n'est pas possible de casser les barrières ». Alors évidemment, il faut une équipe formidable, ce que j'ai avec mon mari, mes musiciens. Il faut vraiment bien s'entourer. Cela fait 20 ans presque avec certains d’entre eux qu'on travaille ensemble. Les musiciens, c'est tous les tontons de ma fille. C'est une très belle histoire. 

 

SM : Christelle Chollet c'est une troupe, en fait ? 

 

CC :

Oui, c'est une troupe, c'est une famille… c’est une caravane quand on part l’été en tournée, il y a les enfants, les chiens de tout le monde. Je crois que j'ai été élevé par mes parents et mes grands-parents comme ça et que je reproduirai ça toute ma vie. Je suis une espèce de labrador, je rassemble les troupeaux et j'aime bien. J'aime avoir dix personnes à la maison. Enfin, voilà, j'ai été élevée dans le Sud-Ouest et je pense que toute ma carrière artistique dépend de ça aussi, de l'éducation artistique de cette troupe, de Roger, des baladins en Agenais, et aussi de ma formidable éducation. Je remercie tous les jours mes grands-parents et mes parents de m'avoir donné autant d'amour et autant de conscience des autres, surtout.

 

SM : On sent, cette sincérité !

 

CC :

J’essaie d'inculquer ça à ma fille et la conscience qu'on ne fait rien sans les autres. J'ai présenté la cérémonie d'ouverture du festival des Fictions et Documentaires de Luchon. J'en parlais avec des jeunes qui étaient à l'école qui me demandaient ce qu’était le plus important pour moi. J’ai répondu : les autres, les équipes. On ne peut rien faire sans. C'est des amis, c'est des gens avec qui je travaille depuis très longtemps et c'est la conscience de ce qui se passe : faire attention aux autres. Et c’est parce que c'est comme ça qu'on grandit, c'est comme ça qu'on s'épanouit et qu'on fait en sorte de se dépasser de casser les frontières artistiques de se surpasser pour faire rire les gens pour les faire s'émouvoir, pour les faire chanter.

 

SM : Nous allons revenir sur votre Sud-Ouest. C'est un autre fait marquant qui vous concerne. Vous êtes Toulousaine, mais une Toulousaine sans accent. Est-ce que c'est possible d'être du sud-ouest sans accent, à part évidemment Cabrel?

 

CC :

Je ne le dis pas, chaque fois que je reviens à Toulouse, je reprends l'accent, parce que sinon je me fais engueuler. Pour tout dire mon père est breton, je suis moitié bretonne, moitié Toulousaine. Mon père n'a pas du tout d'accent, bien qu'il habite encore dans le Tarn et donc c'est venu de là. Et puis je crois que j’avais l’accent quand j'étais petite. D'ailleurs avec Roger, je me suis amusée à reprendre des personnages du Sud-Ouest où l'accent revenait au grand galop. Quand je passe une semaine dans le Tarn, il revient tout naturellement.

 

SM : On est bien d'accord, ce n'est pas pour une question de carrière ? Certains artistes le disent quand on monte à Paris pour percer si on a l'accent de province c'est beaucoup moins facile ?

 

CC :

Non, vraiment c’est comme les binationaux qui parlent deux langues, j'ai toujours jonglé avec les deux. Je me rappelle quand j'étais petite j’avais l'accent, puis quand je suis arrivée au lycée à Toulouse, je n'avais pas l'accent. Je n'ai pas renié mes origines, pas du tout. C'est venu assez naturellement. En plus, ça dépend vraiment des époques : regardez Fernandel.

 

SM : En effet c'était le cas effectivement sur l'ancienne génération.

 

CC :

Au contraire les accents étaient recherchés et valorisant... Peut-être que ça reviendra d'ailleurs...

Aujourd'hui, il y a des artistes gens qui ont une petite pointe d'accent comme ça. Et c'est charmant. Et personne ne dit rien. Mathieu Madénian, il n'a pas l'accent parisien et si on cherche bien, il y a plein d'artistes qui n'ont pas cet accent parisien. Après, pour tourner, c'est un peu compliqué pour des fictions, surtout des films des séries. Mais regardez, le magnifique Daniel Auteuil, qui est du sud et qui n'a pas du tout l'accent : dans Manon des Sources, c'est sublimissime. C'est sa nature de base donc non je ne vais pas renier mon accent.

 

SM : Vous parlez souvent de votre mari, qui est aussi votre producteur et votre réalisateur, comment ça se passe ? Qui a le dernier mot quand il y a une divergence artistique ? Est-ce confortable de travailler avec son mari ? Et pour lui ?

 

CC :

Pour cette dernière partie c’est à lui qu’il faudra le demander. Pour qui a le dernier mot : celui qui a raison ! Parfois ça ne se vérifie pas parce que je crois qu'il a raison ou bien, il croit que j'ai raison et en fait on se rend compte que non nous n’avions ni l’un ni l’autre raison. Nous avons des goûts musicaux, cinématographiques et d’humour très opposés. C’est très chouette pour la création. Je connais toute la variété française depuis 1880 jusqu'à vraiment les années 2000. Je suis imbattable ou à peu près. Lui, il est plutôt anglo-saxon, musique californienne, moi pas du tout. Pour le rire, on n'a pas du tout les mêmes références. Pour les films, alors lui, c'est blockbuster américain, tandis que moi je suis plutôt même sur les séries espagnoles genre « la mesia ». On se complète magnifiquement donc du coup on est très à l'écoute. C'est ça qui est appréciable, c'est que quand il me parle de quelque chose que je connais moins, je suis à l'écoute et je suis très surprise... Et inversement. Par exemple, il y a 20 ans quand je lui ai dit je vais faire un spectacle sur Piaf, il m'a dit ouais c'est ça.. Au final, c'est lui qui l'a écrit. On se balade dans nos univers respectifs. Et c'est très enrichissant. Et après, comme on se connaît tellement bien, on ne prend pas de détour pour se dire les choses. Quand ce n'est pas bien, ce n'est pas bien. Quand ça m'énerve, ça m'énerve. Quand lui, ça l'énerve, ça l'énerve. Mais on arrive toujours à un point de ralliement, on arrive toujours à un consensus, parce qu'on échange. C'est le principe de la démocratie en fait. On parle, on échange et on voit ce qui est le mieux. Et s’il y en a un qui reste sur ses positions à un moment, forcément, le public nous aide aussi. Quand on est en rodage on se dit tu vois bien que c'est mieux ça.. Pour le choix des chansons, j'avoue qu'il m'impose des trucs que je n’aurais peut-être jamais chanté ! Par exemple, moi je n'étais pas à fond sur Nirvana et dans Numéro 5 il m'a fait m'a fait faire un morceau d'anthologie. Il m'a fait mélanger Brel et Nirvana et ça donne un truc d'enfer, avec Vierzon, qui reste vraiment un gros de mes tubes on va dire. J'ai le melon (rires). Et puis moi inversement je l'emmène sur des terrains où il n'a pas peut-être pas envie d'aller. Donc c'est très agréable de repartir même, si on est un peu flippé de repartir encore sur un spectacle parce que c'est toujours l'inconnu. On est depuis trois ans et demi sur Reconditionnée et ça marche à fond : on sait où les gens rient, se lèvent. Et là, il faut repartir. Il faut ressauter dans le vide. Mais c'est génial !

 

Retrouvez Christelle au Théâtre Casino Barrière de Bordeaux, le 4 avril à 20h30

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